Sodome ma Douce (2023)

Crédits

Mise en scène / Julien Barbazin
Auteur / Laurent Gaudé
Scénographie & Lumière / Douzenel
Création sonore / Antoine Lenoble

Avec Eve Meslin

Affiche Jean-Marie Carrel
Durée 50 min
Co-production  Cie Les Écorchés  / Festival de Caves

Dates

- Les 2 et 9 décembre 2023 : Au festival Nuits d'Orient,
le 2/12 à la MJC Monchapet et le 9/12 au Théâtre des Feuillants.

- Du 17 au 19 novembre :  Résidence de reprise à l'abri-culture

Festival de Caves : Tournée de Mai à Juin 2023:

- Besançon les les 17 et 18 mai
- Le Puley le 20 mai
- Besançon le 21 mai
- Auxerre le 26 mai
- Mouthier-Haute-Pierre le 27 mai
- Lons-le-Saunier le 30 mai
- Saint-Claude le 31 mai
- Amange le 01 juin
- Dijon, les 7, 8, 9 et 10 juin,
- Lux le 15 juin,
- Beaune le 17 juin
- Vézelay le 16 juin
- Nuits-Saint-Georges le 20 juin.

Calendrier de création 2023

Du 23 au 27 janvier : Résidence de travail à la MJC Montchapet - DIJON.
Du 06 au 11 février : Résidence de travail à la MJC Montchapet - DIJON.
Du 17 au 22 avril : Résidence de création au Théâtre Mansart - DIJON.

 

 

Le ciel craque, la pluie tombe. Une femme est là qui n'a pas bougé depuis des siècles. L'averse, lentement, la fait renaître. Lorsqu'elle se met à parler, c'est pour évoquer le souvenir de sa ville natale : Sodome. Sodome et Gomorrhe, cités jumelles, libres et sensuelles. Sodome et Gomorrhe, villes sœurs, subversives parce que voluptueuses. Sodome et Gomorrhe, saccagées par la haine des hommes et marquées à jamais du sceau de l'infamie. Qu'a perdu le monde en brûlant Sodome et Gomorrhe ?

« Je sais maintenant ce qu'ils voulaient détruire...
C'est nous qu'ils cherchaient.
Nous, les femmes.
C'est nous qui étions une offense à leur dieu.
Nos bijoux,
Nos cheveux longs,
Nos sourires de séduction,
C'est nous qu'ils voulaient détruire.
Vivantes, nous blasphémions leur dieu.
Ils ont tout saccagé pour qu’il ne reste rien.
Ils ont tout décimé.
Et les murs, doucement, se sont mis a pleurer. »

Celle de Sodome, transformée en statue de sel, se réveille à la vie et raconte sa ville, ses habitants et la manière dont ils ont été frappés : par le plus séduisant des ambassadeurs, porteur d'une maladie mortelle extrêmement contagieuse.Statue de sel sous la pluie, Celle de Sodome distille goutte à goutte son histoire multimillénaire. Comment dans la ville des plaisirs, les habitants ont vu Gomorrhe brûler au loin, puis comment est arrivée une femme rescapée de là-bas. Signe annonciateur du malheur, elle explique alors qu'elle est peut-être contagieuse. La ville se barricade dans l'attente d'une armée ennemie. Personne ne vient. Jusqu'à l'arrivée d'un homme magnifique, ambassadeur de paix. Il est accueilli, fêté comme Sodome sait le faire, dans une fiévreuse offre des corps. Mais il apporte la vérole.Tous meurent dans les pires souffrances laissant un paysage de désolation. L'ennemi gagne grâce à la maladie et conquiert une ville fantôme où il ne reste plus que Celle de Sodome. Les soldats appliquent alors l'ordre divin : "Il voulait que la dernière d'entre nous soit enterrée vivante, dans le sel." Elle ne meurt pas, mais rongée par le sel, au fil des siècles, elle mûrit son projet de vengeance : revenir séduire, comme dernière fille de Sodome, tous ceux qu'elle rencontrera et utiliser son arme suprême, la contagion.

Dans la lignée de Médée Kali, d'Onysos le furieux ou d'Alexandre le grand dans Le Tigre bleu de l'Euphrate, Celle de Sodome semble raconter une histoire mythique mais entraîne ses auditeurs dans des réflexions très personnelles et contemporaines.

"J'étais la rescapée de nos nuits de rire et d'alcool.
J’étais la rescapée de nos vies heureuses,
Je devais tenir.
Dans la ville vide de ma naissance,
Je me suis promis de tenir."

A propos de LA FORME

Laurent Gaudé aime les figures mythiques. Il a déjà fait entendre Médée, dans Médée Kali (en 2003). Dans son nouveau texte, la femme n'a pas de nom, sinon "Celle de Sodome". C'est une statue de sel, qu'une pluie salvatrice délivre de l'attente dans laquelle elle vit depuis des siècles. Ses mots tombent comme des gouttes, pleines, vivantes, juteuses et furieuses. Ils nous rappellent la chute de Sodome, revue par Laurent Gaudé : un dieu vengeur s'introduit dans la ville sous la forme d'"un homme magnifique, au corps puissant et au sourire doux". Il se présente comme un ambassadeur et séduit la population, qui se donne à lui sans savoir qu'il porte un poison mortel : la vérole.

Ainsi, Sodome est atteinte là où elle avait péché, selon le dieu vengeur : par le sexe. Ainsi, une femme porte la malédiction éternelle, parce que la femme est la première offense à la religion. Mais cette femme ne se laissera pas abattre : revenue à la vie, elle entretiendra le souvenir de Sodome, rappelant à l'humanité la force du plaisir, utilisant à son tour l'arme de la contagion, mais par la volupté, cette fois. "Qui veut de moi ? Qui veut de moi ?" Ainsi Laurent Gaudé veut que s'achève Sodome, ma douce.

L'horreur des guerres, les victimes devenues résistantes, la haine des fanatismes : ces thèmes traversent les pièces de Laurent Gaudé. Dans Sodome... on retrouve aussi le sens de l'épique, le goût du lyrisme, les images simples et puissantes qui caractérisent son style. Cela donne au texte un petit côté "contes et légendes des temps anciens", mais l'imagination se met en marche.

Pour cela la comédienne sera enfermée dans une immense « toile de sel » recouvrant l’espace scénique et l’espace public (Une énorme toile parachute traitée). Au milieu des caves, entourée à 360° par les spectateurs, elle émergera doucement au centre durant la représentation, laissant apparaître son corps meurtri, rongé par le sel, sous une robe blanche, elle aussi corrodée par le temps et le sel mais chargé de ce souvenir festif et joyeux de la belle époque de Sodome.
Nous assisterons à sa renaissance, à sa libération de cette prison de sel.

La musique révèlera ce souvenir lointain et presque disparu de cette cité idéalisée de Sodome à travers des nappes successives et sourdes comme si le souvenir enfoui depuis des siècles laissait des traces indélébiles. Mais la musique sera aussi, ces gouttes de pluie qui libèrent doucement celle de Sodome, avec des notes de piano très claires et très longues. Ces gouttes seront le temps présent de la représentation pour les spectateurs contrairement aux nappes qui raconteront les traces, les réminiscences du passé, réel ou imaginaire.

"Le devoir de l'art est de fracasser les consciences" L. Calaferte